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L'acier, savoir-faire stéphanois. 19° et 20° siècles...

19° et 20° siècles : rétrospective.

Le contexte.

Les deux révolutions industrielles du 19° siècle.

La région stéphanoise est une des aires industrielles les plus anciennes de France, spécialisée dans la mine, l'armurerie, la métallurgie et le textile.

A partir de 1818, les industriels font appel aux ressources locales en fer et en charbon pour le coke. La grande entreprise métallurgique naît à Terrenoire. La sidérurgie stéphanoise produit un tiers de l'acier français entre 1860 et 1880.

Cote : FAR FPE 1801 (707)

Le puits Ferouillat de la concession de la Béraudière était situé près de la commune de La Ricamarie.
En exploitation depuis 1886, il a été fermé en 1965.

Cote : FAR FPE 1801 (773)

Les ateliers métallurgiques de la Chaléassière, ou usine Leflaive, anciennement usine Biétrix, étaient situés sur le côté de la rue Bergson, entre la Manufacture d'Armes et les abattoirs.

Cote : FAR FPE 1801 (495)

La sidérurgie en France en 1882.

La Loire se spécialise dans la mise au point des aciers : 84 280 tonnes de fers, 58 547 tonnes de fontes, 132 520 tonnes d'aciers.

La sidérurgie primaire, extraction et élaboration.
La sidérurgie secondaire, transformation et traitement.

Leçon de sidérurgie.

Les différentes étapes de la filière technique.

Élaboration de l'acier à partir du charbon et du minerai, schéma de 1969.

Les différents procédés de fabrication.

On obtient l'acier par un traitement mécanique ou thermique. La filière fonte procède par affinage : décarburation et élimination des impuretés. La filière ferraille procède par fusion.
L'affinage est solide ou liquide. La fonte liquide est convertie en acier, soit par affinage par le vent, procédés Bessemer (1855) et Thomas-Gilchrist (1878), soit par affinage sur sole, procédé Martin (1865), soit par affinage au four électrique.
Le four électrique détrône les procédés hérités du 19e siècle (schéma de 1965).

Les mines et les cokeries.

La houille et la métallurgie sont deux industries connexes, les grands centres de production sont en même temps de grands centres industriels afin d'économiser les transports. Pour faire face à la demande croissante en produits sidérurgiques, l'extraction de charbon et l'approvisionnement en minerai de fer augmentent jusque vers 1975.
Le puits de mine Chatelus vers 1900.

Vue des puits Chatelus 1 (toiture en pagode) et 2 depuis le faisceau de voies. Au premier plan, wagons tombereaux et parc à bois. Devant Chatelus 1, les estacades permettant le chargement des wagons ; entre les deux puits, les ateliers de lavage et les cribles.

Cote : FAR FPE 2112 (345)

Le Clapier et le Puits Chatelus vers 1935.

Les crassiers sont constitués des déchets de lavage du charbon et des stériles issus des creusements de galeries. Ils se développent considérablement lorsque les houillères cessent de remblayer, au tournant des années 1930.

Cote : FAR FPE 1801(1)

Le Puits Couriot et Chatelus vers 1940.

On aperçoit les deux crassiers, déjà bien constitués. Tout au fond, la colline de Montaud coiffée par le puits Sainte-Marie.

Cote : FAR FPE 1801 (2)

Les hauts fourneaux et les fours.

Le haut fourneau est le plus ancien appareil de la sidérurgie lourde. Il produit de la fonte brute (première étape) par fusion et réduction du minerai de fer au contact du coke, le combustible. Différents fours et fourneaux avec des souffleries entrent dans le raffinage des métaux.
Carte en haut à gauche : anciens fours à coke à Méons (vers 1908), cote FAR FPE 1801 (1091). Carte en haut à droite : cokeries et fours à coke, tour de récupération des gaz, estacade de chargement des cokes vers 1920, cote FAR FPE 1801 (265). Carte ci-dessus : compresseurs et batteries de chaudières à vapeur vers 1900, FAR FPE 1801 (111).

Les aciéries.

L'acier se doit d'avoir un dosage exact en carbone et autres métaux pour la fabrication des semi-produits : barres, lingots, profilés, grosses plaques. Les aciéries convertissent la fonte liquide en acier brut (deuxième étape) par affinage ou décarburation au convertisseur, réacteur chimique. L'air passe à travers la charge de fonte.
Ancien pont roulant et la trempe aux aciéries Holtzer, cote FAR FPE 1801 (295).
Carte de gauche : fours à tremper et à cémenter pour durcir l'acier en 1935, cote FAR FPE 1801 (349). Carte de droite : four à réchauffer les gros lingots vers 1910, cote FAR FPE 1801 (196).
Portique de manutention des canons et tour de trempe, usine Barrouin, vers 1910, cote FAR FPE 1801 (222).

Les forges et les laminoirs.

Le martinet est l'ancien instrument de mise en forme de l'acier solide pour des fabrications fines (platinage), le laminoir est destiné aux fabrications courantes. Les laminoirs compressent les blocs d'acier pour le dégrossissage et la finition des produits longs et des produits plats.
Usine Barrouin : le marteau-pilon, force 50 000 kilos.

Contrairement à ce qu'indique la légende, il ne s'agit pas des forges et aciéries de la Marine, dont l'usine principale est à Saint-Chamond, mais des forges et aciéries de Saint-Étienne, l'usine Barrouin. Les usines métallurgiques installent de très gros pilons à partir des années 1880. Le Creusot et Saint-Chamond iront jusqu'à 100 tonnes de masse frappante. Ces énormes marteaux à vapeur sont utilisés pour le forgeage des grosses pièces : arbres de navires, canons de gros calibre.

Cote : FAR FPE 1801 (258)

Usine Barrouin : Laminoir universel et ancienne cisaille vapo-hydraulique, vers 1910.

L'usine Barrouin se situe sur l'actuel pôle de productique.

Cote : FAR FPE 1801 (323)

Volants d'inertie de laminoirs.

Intérieur de la halle de laminage des forges et aciéries de Saint-Étienne. Cette usine, bâtie à partir de 1862, occupait le site de l'actuel pôle de productique. Au second plan, le volant de grand diamètre de la machine à vapeur actionnant les laminoirs, puis les engrenages de démultiplication. Au premier plan, un petit laminoir pour produits ronds. Partout des rails de manutention. Cette usine était spécialisée dans les plaques de blindage et les tôles épaisses.

La compagnie des forges et aciéries de Saint-Étienne a été fondée en 1865 par Barrouin dans le quartier du Marais. Leur emplacement se situe le long de la rue des Aciéries, avec une annexe au Nord-Est du stade Geoffroy-Guichard.

Cote : FAR FPE 1801 (313)

Usine Barrouin. Au premier plan, l'immense presse de 4000 tonnes (puissance de compression). Cote FAR FPE 2124 (53).

La transformation des produits finis.

Bandes, barres, feuilles, fils, plaques, tôles et tubes partent dans la filière d'usinage : l'emboutissage, le tréfilage, le décolletage, pour prendre la forme d'objets. Dur, résistant et relativement léger, l'acier peut être étiré, façonné, martelé, percé, coupé, plié, coulé et soudé.
Arbre porte-hélice en acier brut de forge (longueur 25 m, poids 27 000 kg).

La Compagnie des Hauts-Fourneaux, Forges et Aciéries de la Marine et des Chemins de Fer, fut créée le 14 novembre 1854 : elle résultait de la fusion des établissements Jackson à Assailly (Loire), des établissements Pétin et Gaudet à Saint-Chamond (Loire) et Rive-de-Gier (Loire), de la société Neyrand-Thiollère, Bergeron et Compagnie de Lorette (Loire) et de la Société Parent, Schaken, Goldsmidt et Compagnie (Paris).

Le siège de la compagnie fut installé à Rive-de-Gier puis à Saint-Chamond (9 novembre 1871). Les centres d'implantation des usines de la compagnie s'étendirent progressivement : usines du Boucau (Pyrénées-Atlantiques) en 1881, d’Homécourt (Meurthe-et-Moselle) et du Haumont (Nord) en 1903, d'Onzion (Loire) en 1932.

En 1903, la Compagnie prit le nom de Compagnie des Forges et Aciéries de la Marine et d'Homécourt. Après la guerre de 1914-1918, fut créée la Compagnie de Dépôts et d'Agences de Ventes d'Usines Métallurgiques (DAVUM), chargée des ventes de la compagnie en France (les ventes à l’étranger étant gérées par DAVUM Exportation).

Cote : FAR FPE 1801 (972)

Produits des aciéries et pont roulant vers 1900.
Magasin de barres de fer et d'acier vers 1900.

Les utilisations des objets en acier.

L'armement et le matériel de construction ferroviaire, maritime puis automobile, font la réputation de l'industrie stéphanoise. Outils, pièces, ustensiles et instruments variés sortent des usines en grande quantité. Le commerce s'organise dès 1850.
Exposition Internationale de 1904, Produits des Forges.

Cote : FAR FPE 1801 (975)

Exposition Internationale de 1904. Artillerie, Usine de Saint-Chamond.

Cote : FAR FPE1801(954)

Exposition Internationale de 1904. Aciéries et forges de Firminy.

Cote : FAR FPE2112(173)

Les acteurs de la fabrication de l'acier dans la région stéphanoise au 19° siècle.

Les fondateurs de l'industrie métallurgique moderne à Saint-Étienne.

Saint-Étienne commence la production industrielle et massive d'acier fondu en 1815 et la Loire devient le berceau d'une nouvelle métallurgie. Les entreprises innovantes sont concentrées entre les mains d'un petit groupe d'ingénieurs et d'industriels.
La technicité ou savoir-faire échappe aux anciens forgeurs, pour devenir technologie en développant des nouveaux procédés que l'autorité scientifique éclaire par son savoir : c'est la métallurgie rationnelle et savante.
Ecole des Mineurs, Château de Chantegrillet, avant 1927. Cote : FAR FPE2112(4)
D'abord installée dans une maison en location rue d'Artois, l'École des mines fut transférée en 1848 dans le château de Chantegrillet, (carte postale précédente), qui avait été acheté par l'État aux Frères des Écoles chrétiennes. Le bâtiment actuel du Cours Fauriel a été achevé en 1927 et inauguré en 1933 par le Président de la République Albert Lebrun.

Cote : FAR FPE2112(61)

École Nationale Supérieure des Mines : Laboratoire de recherches métallographiques.

Cote : FAR FPE 1801(531)

Ingénieurs et savoir, première révolution industrielle.

Louis-Antoine Beaunier (1779-1835).

L'ingénieur des Mines veut créer une entreprise dont il a la charge et qu'il érige en usine-modèle pour fournir des procédés nouveaux aux industriels. Beaunier établit les plans d'une aciérie à la Bérardière sur le Furan. Pour la première fois en France, une usine affine des aciers bruts selon la méthode allemande. Le chemin de fer facilite l'approvisionnement et la vente.
Louis-Antoine Beaunier.

Louis-Georges de Gallois (1775-1825)

Découvreur des mines de fer à Saint-Étienne, Louis de Gallois, collègue de Beaunier, établit à Terrenoire en 1819 une usine qui concentre en un même lieu la transformation du minerai en fonte dans des hauts fourneaux puis l'affinage de la fonte dans des fours à puddler et des laminoirs selon le procédé anglais.

Ingénieurs et savoir, deuxième révolution industrielle.

Jean-Baptiste Boussingault (1801-1887)

Chimiste, élève de Beaunier et de Louis de Gallois, Boussingault met en évidence en 1886, la plus grande résistance à la corrosion d'un acier contenant du chrome. Il met au point l'acier inoxydable et les aciers alliés, dits « spéciaux », dans le laboratoire de l'usine Holtzer à Unieux. C'est le début de la métallographie.
Émmanuel-Louis Gruner

Maître incontesté de la métallurgie moderne et savante, Gruner met en place des procédés de décarburation pour fabriquer des produits nouveaux à partir d'un classement fait selon une analyse chimique des composants de l'acier. Il entrevoit la solution pour traiter les fontes phosphoreuses.

Cote : MAG FA 3036

Techniciens, savoir-faire et procédés, première révolution industrielle.

James Jackson (1771-1829)

Anglais de Birmingham, Jackson introduit en France, en 1815, le procédé de l'acier fondu au creuset. Il installe son usine au Chambon-Feugerolles sur la rivière Ondaine. Ses fils multiplient les créations d'usines métallurgiques dans la région stéphanoise. Ils sont les maîtres de l'industrie de l'acier en 1837.

Cote : FAR FE 659

Patrons et ouvriers, faire et produire, première révolution industrielle.

Louis-Marie Frerejean (1791-1846)

Avec Louis de Gallois, Frerejean va étudier les exploitations anglaises puis ouvre la première usine sidérurgique française en 1819 à Terrenoire. Il dessine les plans de la fonderie destinée à convertir la fonte en fer malléable et installe des machines à vapeur, des laminoirs, une soufflerie, des fours de réchauffage et des martinets. Il fait venir d'Angleterre une cinquantaine d'ouvriers spécialisés.

Cote : FAR FPE1801(927)

Benoît Fourneyron (1822-1867)

En 1850, cet inventeur crée sa propre usine au Chambon-Feugerolles pour construire des moteurs hydrauliques à vapeur et expérimenter sa turbine sur le cours d'eau du Valchérie. Il adjoint une fonderie et un atelier d'usinage.

Patron et ouvriers, faire et produire, première révolution industrielle.

Alexis Massenet (1788-1863)

Attiré par la production d'acier fondu à Saint-Etienne, Massenet, maître de forges crée en 1839 à la Terrasse une fabrique de lames de faux et de faucilles dans laquelle les frères Jackson prennent des parts. En 1842, l'industriel ouvre une nouvelle usine sur la rivière Semène à Pont-Salomon pour concurrencer l'usine de Frédéric Dorian sur le Furan à Rochetaillée.

Cote : FAR FPE1801(1014)
Jacob Holtzer (1802-1862)

En 1840, Holtzer, fondateur de l'usine d'Unieux obtient de l'acier par fusion et installe des fours au coke. Pionnier en France de la fabrication de l'acier puddlé, cet industriel se lance en 1857 dans la fabrication des cloches en acier moulé.

Les établissements Jacob en 1870.
Pierre-Frédéric Dorian (1814-1873)

Dorian, maître de forges, est fabricant de faux et faucilles en acier fondu dans la vallée de Rochetaillée quand il épouse la fille de Jacob Holtzer et prend la tête de l'usine Holtzer à Unieux.

Celle-ci fabrique des armes blanches et de l'outillage en aciers fins. L'aciérie au creuset fonctionne selon le procédé Siemens-Martin avec une fonderie au coke à partir de 1869.

Article de presse du "Journal hebdomadaire illustré", rédigé pour l'inauguration du monument élevé à la mémoire de Dorian sous le titre "Le Panthéon de l'industrie". Montbéliard, 1814 - Paris, 1873. Maître de forges à Unieux, maire de cette ville en 1860, conseiller général puis député du département de la Loire en 1863. Ministre des travaux publics du gouvernement de Défense Nationale en 1871. Cote : FAR FPE59

Le monument se trouvait à l'intersection de l'avenue Libération et du cours Hyppolite Sauzéa. Le square entourant la statue n'existe plus. La statue elle-même qui était en bronze a été récupérée par les allemands pendant la seconde guerre mondiale pour être fondue.

Cote : FAR FPE2112(330)

Charles Barrouin (1813-1889)

Directeur technique des usines de Saint-Chamond, Barrouin perfectionne le matériel sidérurgique.

Il fonde en 1865 la Compagnie des fonderies, forges et aciéries de Saint-Étienne qui fabrique des rails, des plaques de blindage et des éléments de canons en acier puddlé.

Technicien, savoir-faire et procédés, deuxième révolution industrielle.

Pierre-Emile Martin (1824-1915)

Le premier four Martin de France, four à réverbère chauffé au gaz, est installé à Firminy en 1867 puis à Terrenoire en 1868.

Dans ce four Siemens adapté à des températures supérieures à 1600°C, Martin réutilise des ferrailles pour couler de la fonte et obtenir de l'acier par affinage.

Les « aciers Martin », de meilleure qualité, sont choisis pour l'armement et les chemins de fer.

Cote : IND A4399

Une nouvelle technologie

Amorcé au début du 19e siècle par Jackson, Beaunier et Louis de Gallois, le décollage de la production industrielle d'acier s'effectue dans les années 1860 pour répondre aux besoins des chemins de fer.

Le développement de la sidérurgie stéphanoise se résume en trois temps forts :

Nous devons à Gruner la déphosphorisation des aciers et sur la base d'une codification des savoir-faire existants, un classement des aciers selon leur structure physique.
L'invention et la mise en place dans la Loire des procédés Bessemer (1855-1862), Siemens-Martin (1864) puis Thomas-Gilchrist (1874-1879)
L'apparition de nouveaux produits comme les aciers spéciaux (1876-1889) pour alimenter la course aux armements à partir de 1880.
Appareils Bessemer.

Arrivée de la fonte.

La sidérurgie en France au 20° siècle.

Les nouveaux modèles techniques et économiques.

Les procédés modernes de réduction directe au gaz sont une alternative aux hauts fourneaux.
Concurrencés par les aciéries à oxygène installées après 1945, les derniers convertisseurs Martin et Thomas disparaissent vers 1978.

Déclin de l'industrie de l'acier à Saint-Étienne à la fin du 20e siècle.

Les grands établissements stéphanois, associations d'entreprises connaissent des difficultés à partir des années 1980. Ils se scindent et les unités « aciéries » disparaissent. Parmi les milliers de métallurgistes des années 1970, il ne reste aujourd'hui que quelques centaines d'ouvriers.

fin.