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Le recul de la forêt Que faire quand les arbres tombent malades ?

En France, toutes les forêts sont aujourd’hui fragilisées par le changement climatique. Les arbres, qui sont au centre de cet écosystème riche et complexe, sont confrontés à de nombreuses menaces : sécheresses, canicules, insectes, maladies, incendies, tempêtes… Ces phénomènes ne sont pas nouveaux, mais ils sont de plus en plus intenses et fréquents. Leurs conséquences sur les arbres sont souvent irréversibles, comme on peut l’observer dans les forêts de l’Oise et du Jura.

Dans la forêt de Chantilly, le chêne est encore roi. Ce robuste feuillu représente près de la moitié des arbres du domaine de 6300 hectares. Ici, les chênes comptent parmi les plus grands et les plus anciens d’Europe !

Pourtant, dès 2018, les forestiers ont donné l’alerte : un chêne sur trois est en train de mourir. Depuis, le dépérissement des arbres s’est encore accéléré, faisant craindre la disparition des grands arbres à moyen terme.

Ce que l’on n’a pas vu venir, c’est le cumul des stress. Le chêne a une certaine résistance au manque d’eau, mais le stress hydrique est devenu permanent. Et puis, la situation s’est aggravée avec les vagues de chaleur, qui brûlent les feuilles, et les attaques de hannetons !

Daisy Copeaux, directrice du domaine forestier et immobilier du château de Chantilly

Avec la hausse des températures et les sécheresses répétées, la ressource en eau est déficitaire depuis 2014. Les arbres, fragilisés, sont aussi victimes des hannetons dont les populations ne sont plus régulées par les gelées hivernales et qui s’attaquent à leur système racinaire.
Les mêmes dépérissements inquiétants s’observent dans la forêt jurassienne, majoritairement composée de résineux. Ici, c’est le scolyte, un petit insecte xylophage, qui fait des ravages dans les peuplements d’épicéas.
Les arbres attaqués se repèrent par le changement de la couleur de leurs aiguilles qui virent au brun avant de disparaître complètement.
En montagne, la faune et la flore de la forêt sont déjà impactées par le changement climatique. En plus du dépérissement des arbres et des attaques de ravageurs qui s’aggravent, on commence à observer une reproduction précoce pour certaines espèces, c’est notamment le cas du grand tétras, la remontée en altitude des animaux de plaine, une raréfaction des ressources…

Axel Peyric, chargé de mission milieux naturels, parc naturel régional du Haut-Jura

Autre source d’inquiétude, les feux de forêt. Pour la première fois de son histoire, le département du Jura a connu un incendie majeur pendant l’été 2022 et plusieurs départs de feu. Plus de 1 000 hectares de végétation sont partis en fumée.

Alors pour aider la forêt à s’adapter à la nouvelle donne climatique, plusieurs pistes sont suivies par les chercheurs et acteurs forestiers. La préservation et la gestion durable de la forêt, en favorisant par exemple la régénération naturelle là où elle est possible, est une priorité.

Florent Dubosclard, directeur de l'ONF du Jura

L’introduction de nouvelles essences mieux adaptées au climat plus chaud et plus sec de demain est aussi à l’étude. Des tests en conditions réelles sont conduits par l’Office national des forêts (ONF) sur de petites parcelles implantées en forêt. Il en existe déjà 90 en Bourgogne-Franche-Comté. On les appelle Îlots d’avenir.

Constitués d’une seule essence – cèdre de l’Atlas, calocèdre de Californie… – ces îlots permettent un suivi strict et régulier. À terme, ils permettront aussi de récolter des graines issues de ces nouvelles essences. Des graines d’avenir.

Nous nous sommes rendus dans la forêt jurassienne et au domaine de Chantilly, victimes du changement climatique, pour rencontrer les acteurs de terrain qui mettent en place des solutions pour s’adapter.

Credits:

[ Texte : Anne Baron ] - [Photos : Arnaud Bouissou - TERRA ]

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