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Imagerie médicale (radiodiagnostic et échographie médicale), médecine nucléaire, radio-oncologie et électrophysiologie médicale Résultats des sondages réalisés auprès des membres de l’APTS à l’automne 2022

Une série de sondages réalisés auprès des technologues en imagerie médicale, en médecine nucléaire, en radio-oncologie et en électrophysiologie médicale lève le voile sur l’organisation du travail et les enjeux professionnels qui les concernent. Le secteur de l’organisation du travail et des enjeux professionnels (SOTEP) a en effet fait parvenir aux membres de l’APTS concerné·e·s quatre sondages portant sur les enjeux en imagerie médicale (radiodiagnostic et échographie médicale), en médecine nucléaire, en radio-oncologie et en électrophysiologie médicale du 21 septembre au 12 octobre 2022. Dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, de déploiement du Plan pour mettre en œuvre les changements nécessaires en santé (Plan santé) et sur fond d’allongement des listes d’attente, nos technologues sont confronté·e·s à de nombreux défis dans leur réalité quotidienne. Nous vous présentons ces derniers dans les pages qui suivent.

PRINCIPAUX CONSTATS

De prime abord, l’analyse des données du sondage nous permet de constater qu’un nombre important de répondant·e·s mentionnent que leur équipe de travail a des postes vacants depuis six mois et plus, et ce, dans plusieurs secteurs. On remarque également qu’il y aurait plusieurs absences non remplacées, laissant les équipes face à un manque criant de personnel. Ce constat, qui nous étonne peu, appuie un argument couramment évoqué dans les critiques du projet de loi nº 15 (PL 15), notamment par l’ancien président du Secrétariat du Conseil du trésor, Denis Bédard. Les problèmes vécus dans le réseau de la santé et des services sociaux (RSSS) ne découlent pas majoritairement d’enjeux de gouvernance mais plutôt d’enjeux de conditions de travail (note 1).

Ce manque de personnel a nécessairement des effets néfastes sur la charge de travail des technologues œuvrant dans ces secteurs. Près de la moitié des répondant·e·s estiment ne pas avoir une charge de travail adéquate, ou tout à fait adéquate, nous informant ainsi de la surcharge de travail qui prévaut dans ces secteurs.

Il devenait nécessaire d’approfondir les éléments qui contribuent le plus à alourdir la charge de travail des membres. Pour chacun des secteurs, quatre facteurs ressortent : la pénurie de personnel, les requêtes urgentes des médecins, le nombre d’usager·ère·s et de patient·e·s par quart de travail et les postes non remplacés.

Cette surcharge de travail reliée en partie à la pénurie de personnel et aux requêtes urgentes des médecins a certainement un impact sur le temps supplémentaire de nos membres technologues. Ainsi, près d’un·e technologue sur deux fait de 1 à 6 heures de temps supplémentaire (TS) dans une semaine régulière de travail. On constate aussi que plusieurs de nos membres ne déclarent pas systématiquement le TS effectué, ce qui contribue à fausser les données de l’employeur concernant la surcharge de travail dans certaines équipes de travail.

Les données émanant du sondage démontrent également que la surcharge de travail a un impact non négligeable sur les temps de repos. Il est en effet inquiétant de constater le nombre restreint de nos membres (14 % seulement des technologues en imagerie médicale) qui sont en mesure de toujours prendre leur pause et leur temps de dîner durant une semaine de travail régulière.

CONSÉQUENCES

À la lumière de ces constats, on peut facilement faire le lien entre les conditions de travail actuelles et la capacité du RSSS à retenir une main-d’œuvre à bout de souffle. Il est inquiétant de constater que plus de la moitié de nos répondant·e·s ont songé à quitter le réseau public dans la dernière année. Les équipes actuelles ne sont donc pas à l’abri de départs imminents, ce qui engendrerait un déséquilibre important dans les services d’imagerie médicale, de médecine nucléaire, de radio-oncologie et d’électrophysiologie médicale.

Des départs additionnels ne feraient qu’empirer la surcharge de travail actuelle qui, à son tour, fera augmenter le nombre de départs. Malgré les affirmations répétées du Ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) selon lesquelles la réforme majeure (PL 15) qui s'enclenche fera du réseau un employeur plus attirant, aucune garantie n’existe à cet effet. Au contraire, l’expérience de la réforme Barrette tend à démontrer que les changements de cette ampleur se font au détriment de l’attractivité du réseau (note 2) .

FACTEURS EXPLICATIFS DES DÉPARTS

Il est donc important de comprendre les raisons qui poussent les technologues à vouloir quitter leur profession. Le motif principal exprimé par ceux·celles questionné·e·s, tous domaines confondus, est un changement de profession. Cet exode aurait-il un lien avec les conditions de travail dans ces secteurs? Les réponses aux sondages tendent à donner du poids à cette hypothèse.

Pour les technologues en imagerie médicale et en électrophysiologie médicale plus spécifiquement, on constate un net attrait des cliniques privées, une tendance confirmée par nos équipes locales. Les horaires flexibles et les salaires compétitifs attirent en effet plusieurs de nos membres, accentuant le problème de rétention dans le RSSS. Le PL 15, qui ouvre encore davantage les portes au privé dans notre système de santé et de services sociaux, viendra vraisemblablement aggraver ce problème. Pourtant, les données du gouvernement ont montré, par exemple, que le coût des chirurgies est jusqu’à deux fois plus élevé au privé qu’au public (note 3) .

Il est intéressant de constater que l’attrait du privé ne s’exerce que peu, sinon pas, sur nos membres technologues en médecine nucléaire et en radio-oncologie. On peut supposer que le fait que les cliniques privées ne soient pas très nombreuses dans ces domaines en soit la raison. Les technologues issu·e·s de ces domaines envisagent plutôt un possible retour aux études lorsqu’il·elle·s prévoient quitter le RSSS.

À la lueur de la situation, il est donc peu surprenant de constater que beaucoup de nos membres souhaitent quitter le réseau. C’est ainsi que près de 30 % de nos technologues comptent le faire dans la prochaine année. Une telle situation est très inquiétante car ces départs feraient perdre au RSSS environ 1 628 technologues sur les 5 427 que l’APTS représente. En tenant compte du fait que les CÉGEPS forment environ 300 diplômé·e·s par année, il sera particulièrement difficile de combler les postes libérés.

MANQUE DE NOTORIÉTÉ

Les résultats du sondage montrent également que la quasi-totalité des répondant·e·s considèrent que leur profession est inconnue de la population. On constate clairement un appétit pour davantage de reconnaissance dans l’ensemble des milieux de travail. C’est pourquoi nous militons encore plus fort pour valoriser et améliorer l’attrait de ces professions, trop souvent oubliées. Elles sont essentielles à un réseau fort!

À LIRE

Non, les technologues en imagerie médicale ne font pas que «peser sur des pitons», BleuAPTS, 2023.

(Note 1) Bédard, D., (2023, avril 26), «Santé Québec : Un projet démesuré et irréaliste», La Presse. https://www.lapresse.ca/debats/opinions/2023-04-26/sante-quebec/un-projet-demesure-et-irrealiste.php

(Note 2) Caillou, A., (2020, février 8), «La pire réforme de la santé», Le Devoir. https://www.ledevoir.com/societe/sante/572542/la-pire-reforme-de-la-sante

(Note 3) Larin, V, (2023, avril 24), «Opérations au privé : Jusqu’à deux fois et demi plus cher, selon des données de Québec», La Presse. https://www.lapresse.ca/actualites/sante/2023-04-24/operations-au-prive/jusqu-a-deux-fois-et-demi-plus-cher-selon-des-donnees-de-quebec.php